Né à Clermont-Ferrand en 1784, George Onslow (1784-1853) fut une figure singulière de l'Histoire de la Musique : très largement et unanimement reconnu de son vivant, il est aujourd'hui pour ainsi dire oublié et son œuvre, essentiellement consacrée à la musique de chambre pour cordes, est quasi absente du répertoire notamment essentiellement en raison du fait qu'elle n'est plus disponible depuis plus d'un siècle en édition moderne. Issu d'une ancienne famille de l'aristocratie anglaise, dont plusieurs membres jouèrent un rôle important dans la vie politique britannique (son grand-père, premier comte d'Onslow, fut "speaker" à la Chambre des Communes), George Onslow est né en 1784 à Clermont-Ferrand où Édouard, son père, était venu s'installer en 1781 à la suite d'un scandale familial qui l'avait contraint à quitter son sol natal.
Rapidement intégrés dans la notabilité clermontoise, les Onslow menèrent une vie paisible jusqu'en 1789, date à laquelle la Révolution vienne compromettre leur sécurité. Emprisonné en 1793 en raison de sa nationalité, et en dépit de sa connivence avec Couthon dont il était frère en maçonnerie, Édouard Onslow fut poussé à l'exil en 1797. Son fils aîné, George, l'accompagne dans ce qui devint pour lui un voyage d'étude. Entre 1798 et 1806, il étudia le piano auprès de plusieurs maîtres, notamment Cramer, Dussek et Hullmandel qui enseignaient à Londres ; des séjours en Allemagne et en Autriche lui permirent de parfaire sa formation d'instrumentiste. Onslow ne se destinait pas encore à la carrière artistique, et encore moins à celle de compositeur : l'étude du piano n'était qu'un des aspects de son éducation, au même titre que les mathématiques, l'Histoire, l'escrime, l'équitation, le dessin (deux de ses frères se consacrèrent à la peinture), etc.
Du point de vue de ses parents, il s'agissait davantage d'un talent de salon que d'une compétence professionnelle : du reste, Onslow ne se produisit jamais en récital en tant que pianiste, et ce n'est qu'à Clermont qu'il accepta de temps à autre de faire applaudir ses dons d'improvisateur. Il pratiqua également le violoncelle en amateur afin de compléter un quatuor d'amis avec qui il pratiquait le répertoire des maîtres (Mozart, Haydn, le jeune Beethoven). C'est en entendant l'ouverture de Stratonice, un opéra de Méhul, qu'Onslow découvrit sa vocation de compositeur : il était alors âgé de 22 ans. Son premier essai, un recueil de trois quintettes, remporta un tel succès que ses amis, ses interprètes et Pleyel, son éditeur, l'encouragèrent à persévérer. Quatuors et trios suivirent aussitôt, mais Onslow mesura rapidement ses lacunes et décida de compléter ses connaissances théoriques en se remettant aux bons soins d'Anton Reicha qui fut son seul et unique maître de composition. Son influence devait se révéler décisive, tant d'un point de vue esthétique que stylistique.
Onslow entama alors une brillante carrière qui fit de lui rapidement un compositeur incontournable de la vie musicale de la première moitié du XIXème siècle : les plus grands interprètes l'inscrivirent à leur répertoire et son nom côtoya ceux de Mozart, Haydn et Beethoven dont on estima qu'il est le digne et unique successeur. Surnommé "le Beethoven français", il fut le seul, du moins en France, à se consacrer à la musique de chambre : avec 36 quatuors et 34 quintettes, Onslow laissa une production exceptionnelle qui alimenta durant plus de cinq décennies les principales sociétés de concert européennes, tout en faisant les beaux jours des éditeurs jusqu'aux États-Unis (Schirmer). C'est surtout en Allemagne qu'Onslow rencontra la plus grande faveur : inscrit au panthéon des gloires germaniques, Onslow jouit d'une faveur exceptionnelle auprès des musiciens et du public, dont Mendelssohn et Schumann furent les témoins vivants. Non content de réunir les suffrages de ses contemporains, et de bénéficier d'une diffusion éditoriale peu commune, Onslow jouit également d'une large reconnaissance institutionnelle : membre de la plupart des sociétés philharmoniques d'Europe, il fut élu en 1842 à l'Académie des Beaux-arts, devant Berlioz notamment.
À une époque où, à Paris notamment, on cultivait surtout le goût du vaudeville et de l'opéra-comique, Onslow incarna la continuité de la grande école classique et servit d'alibi aux tenants d'une décadence de la musique dans un contexte marqué par la "privatisation" de la vie musicale. Les "soirées de quatuors" de Baillot à Paris, de Lindley à Londres, et de Zimmermann à Berlin étaient considérées comme les derniers refuges de la "véritable musique" et Onslow devint le héraut des défenseurs de la tradition et de l'excellence instrumentales contre les dérives que représentaient, à leurs yeux, les romances, les quadrilles et autres musiques de divertissement. Onslow composa trois opéras, poussé à la fois par sa curiosité et le souci d'asseoir sa renommée (L'Alcade de la Vega, 1824, Le Colporteur, 1827, et Le Duc de Guise, 1837) : en dépit de leur programmation à la salle Favart, les témoins de leur création furent unanimes à considérer qu'ils auraient mérité d'être montés à l'Opéra. Les partitions lyriques d'Onslow étaient d'une densité et d'une complexité inhabituelles pour le public de l'époque et, en l'absence de livret de grande qualité (critère rédhibitoire à l'époque), ils n'obtinrent qu'un succès d'estime, en dépit du fait qu'ils furent salués par la critique, et en particulier Berlioz qui défendit Le Duc de Guise avec enthousiasme. Dans sa musique instrumentale et orchestrale, Onslow préfigura le romantisme par la richesse de son harmonie, la prépondérance des chromatismes, le tempérament tempétueux et tourmenté de son écriture et la ferveur de ses thèmes lyriques : la difficulté d'exécution de ses quatuors et quintettes, déjà connue de son temps, constitua un des motifs de leur abandon par les interprètes.
Tout en ayant eu une brillante carrière internationale, et en dépit des sollicitations toujours plus nombreuses, Onslow resta fidèle à l'Auvergne puisque, né à Clermont-Ferrand, il décéda dans cette même ville, ce qui le distinguait des artistes "montés à Paris". Très attaché à la capitale auvergnate, apprécié pour sa générosité (concerts de bienfaisance, participation aux bonnes œuvres, etc.), et son caractère courtois et affable, Onslow fit rejaillir sur Clermont tout le prestige de son nom, sans que sa musique n'y soit jamais vraiment appréciée et comprise. Il fut un châtelain respecté et entouré de bienveillance : véritable gentleman-farmer, il mit autant de talent à gérer ses propriétés qu'à négocier ses contrats avec Breitkopf & Härtel ou Schlesinger. Tout en ayant une demeure à la campagne (château de Chalendrat puis de Bellerive), Onslow conserva toujours ses appartements à Clermont : place Michel de l'Hospital tout d'abord (qui s'appelait encore place du Marché aux bois au début du XIXème siècle), puis rue Pascal, au numéro 2, où il décéda le 3 octobre 1853. Il repose au cimetière des Carmes, à côté de quelques-unes des grandes familles auvergnates...
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